En décembre j'attendais avec impatience la deuxième partie du projet sur lequel je travaillais. Cette partie correspondait à la réalisation d'une nouvelle application web, Youpplis (le nom a été modifié pour respecter la clause de confidentialité). La réalisation était entièrement à ma charge, spécifications et développement. J'allais être la maman de Youpplis. Pour une fois j'allais pouvoir créer...

Sauf que le démarrage a pris du retard et le projet a été reporté en février, ce qui m'a fait errer quelque temps de projet en projet. Le client a quand même trouvé du budget pour m'occuper deux semaines en attendant le deuxième début, tellement il voulait que je ne sois pas accaparée par un autre client et qu'un développeur anonyme et brouillon ne vienne me remplacer. Puis pour des raisons de politique interne le projet a encore été reporté et le mois d'avril a été évoqué.

Ce retard me rendait disponible pour une autre mission. Il a fallu que je réfléchisse si accepter cette mission de cinq mois qu'on m'imposait me proposait était le bon choix, si ça n'allait pas me faire rater cette formidable opportunité qu'est Youpplis. On dirait que si. Mais refuser la mission ne me garantissait de toute façon pas d'être là au bon moment, la date de démarrage évoquée étant pour le moins incertaine. Et en cas de refus de cette mission on m'en aurait proposé une autre, peut-être encore plus longue, peut-être bien moins intéressante. Bref cela n'aurait fait que retarder le problème.

C'est à la fois un avantage et un inconvénient de cette mission : elle ne se déroule pas sur Lyon. Je me suis demandé ce qu'allaient devenir mes plantes, j'ai regretté de devoir arrêter d'aller jouer au badminton les mercredis soirs, de ne pas pouvoir me relancer pour l'instant dans une expérience de lombricompost. Et j'ai mesuré la chance que j'avais qu'on me propose d'aller découvrir une ville tous frais payés, alors qu'aucune contrainte familiale ne m'empêche d'en profiter... Cinq mois c'est long pour quelqu'un qui n'a jusqu'à présent jamais passé plus de deux mois sur un même projet. Mais c'était déjà il y a cinq mois que je changeais de client, et finalement c'était presque hier.

Alors, peut-être, partir m'empêchera de créer Youpplis. Mais peut-être que le démarrage sera encore reporté de quelques mois, juste pour quand je terminerai cette mission. Je compte sur le triangle magique qui surplombe Youpplis, qui fait que tant pour le client, que pour mon employeur, que pour moi, ce serait bien mieux si j'y étais impliquée. J'ose espérer que le client voudra tellement que ce soit moi qui m'en occupe (oui j'ai fait un excellent travail jusqu'à présent) qu'il pourra retarder encore un peu le projet s'il devait naître trop tôt. Mais je rêve trop, je crois...